2cv à Périgueux (2)

Les prétextes légèrement spécieux qui présidaient à la tenue de ce rassemblement de deux chevaux Citroën dans la cité pétrocore étaient d'une part les 75 ans de la 2cv et la fête des pères.

"Un art de vivre". Rien de moins. Un temps, je m'en souviens, certaines 2cv indiquaient, sur un autocollant apposé sur la lunette arrière, l'avertissement suivant : "Je ne roule peut-être pas vite mais je suis devant vous". Si ma mémoire ne me fait pas défaut, mon grand-frère avait marqué sur la porte de malle la devise suivante : "Rigole pas, bourgeois, ta fille est peut-être à l'intérieur". Je ne suis pas sûr qu'il reste encore une trace iconographique de la chose dans les archives familiales. Je me renseignerai à l'occasion.

Philosophie à la petite semaine
Quoi qu'il en soit, dans le cahier des charges originel, il n'était pas fait état d'art de vivre. Pierre Boulanger qui présidait aux destinées de Citroën depuis que la marque était tombée dans le giron de Michelin après le suicide de André CItroën avait défini ses attentes d'une manière laconique mais précise. Il voulait une voiture "pouvant transporter quatre personnes et 50 kg de pommes de terre, à la vitesse de 60 km/h, pour une consommation de 3 litres d'essence aux 100 km... elle devra être conduite par une femme ou un débutant... et l'esthétique, je ne veux pas en entendre parler !". En charge au bureau d'études de se débrouiller avec ça. Faible consommation, ça veut dire faible poids. Le poids, c'est l'ennemi. On a pensé utiliser des matériaux nobles. Magnésium, aluminium. Ce fut de la tôle mince qui fut choisie. Moins chère.
L'histoire de la 2cv a été émaillée de rebondissements, d'errements et de questionnements qui nous montrent combien, en ces années trente, l'industrie automobile était encore une affaire d'ingénieurs et de bricoleurs de génie. Ce qui fait la force incontestable de la 2cv, c'est cette vision que Pierre Boulanger avait de ce que devait être la voiture populaire. Dans ces années lointaines, la France était encore principalement rurale. Les routes étaient encore bien souvent des chemins blancs et l'attente, les besoins, étaient dans une automobile utilitaire et facile.
"Un parapluie sur quatre roues", dira-t-on plus tard. Tout à été pensé et choisi en fonction du maigre cahier des charges. Une capote ? Parce que c'est moins lourd que la tôle. Les grandes roues ? Pour passer les nids de poule. Des phares ? Oui... Mais la réglementation n'en impose qu'un ! On gagne du poids. Les sièges ? Une simple structure tubulaire tendue de tissu. Pierre Boulanger refusait d'entendre parler d'une quatrième vitesse. On n'en mit pas. Ou plutôt, on l'appela malicieusement "surmultipliée" avec un "S" pour l'indiquer sur le schéma explicatif du passage des vitesses peint sur le tableau de bord.
La 2cv est "la" voiture intelligente. Elle peut partager ce titre, peut-être, avec la Ford T. Si elle est aujourd'hui objet de convoitise et de dévotion, il faut se souvenir de l'accueil moqueur qu'elle a reçu à sa présentation publique. Elle est laide, la 2cv. Objectivement. Laide mais pleine de charme.

2cv Type A magnifique
Lors de ce rassemblement, des modèles de toutes les années étaient présentés. La plus belle, la plus ancienne, la mieux restaurée était cette Type A de 1951. C'est là la "vraie" 2cv, celle qui répond le mieux au cahier des charges. Elle ne roule pas vite mais elle emmène bien son chargement prévu sur les petites routes. La légende dit que Walter Becchia, l'ingénieur génial, aurait conçu le moteur en une nuit. Et génial, le moteur l'est aussi ! Un petit flat-twin culbuté robuste, vif, fiable. Il acceptera de grossir au fil des ans sans jamais rien perdre de ses qualités.

Une restauration exemplaire menée jusque dans les plus intimes
Rapidement, le cœur de cible de la 2cv sut s'élargir et tout le monde voulut sa 2cv. Les jeunes virent là le véhicule qui allait pouvoir leur permettre de parcourir le vaste monde et découvrir de nouveaux horizons. Après la croisière jaune et la croisière noire, Citroën renouait avec ses raids motorisés. Une 2cv présente à Périgueux était un témoin "vivant" de cette époque.

Historique !
Chez Citroën, ont su prendre conscience de la mine sur laquelle on était assis. On avait une base mécanique qui permettait toutes les folies automobiles. Une plate-forme et un moteur, une transmission et des suspensions qui autorisaient tout. On fit des utilitaires, des véhicules ludiques, des automobiles plus cossues, des véhicules à quatre roues motrices. Que ce soient les Méhari, les AMI 6 et AMI 8, les Dyane, les 2cv Sahara ou les fourgonnettes diverses, tout a été tenté sur cette base. Tout ou presque. Citroën a été quelque peu frileuse mais heureusement, des acteurs extérieurs planchèrent aussi sur la question.

Lomax, le plaisir à belles dents
Pourquoi Citroën n'a pas osé aller voir du côté du véhicule réellement amusant ? Pourtant, la 2cv s'y prête merveilleusement ! N'oublions pas que certains prototypes ont utilisé un moteur de moto BMW. La 2cv, finalement, est peut-être la première motocyclette à quatre roues. Il est d'ailleurs amusant de voir que, longtemps, la seule "caisse" qui gréaient aux motards était la deux pattes !

Méhari, la 2cv en plein air
La Méhari est née en 1968. Son lancement a été un peu raté à cause des événements menés par de dangereux gauchistes. C'est là aussi une voiture géniale qui n'est pas sans rappeler tout à la fois la célèbre Jeep et la Mini Moke. C'est un véhicule de loisirs. A l'aise sur les petits chemins et en ville, facile d'accès, amusante à conduire, capable d'accueillir des charges volumineuses, elle est aujourd'hui l'objet d'une économie parallèle qui fait que son prix la rend plus ou moins inabordable. Ceci étant, il est possible aujourd'hui, si l'on y met le prix, d'acheter sa Méhari "neuve", entièrement refaite avec un maximum de pièces refabriquées.

Rare UMAP, moins d'une centaine produites
Bien plus rare et certainement pas moins chère, était présente une UMAP. Il s'agit d'un ravissant petit coach sportif capable d'atteindre un bon 100km/h construit à la fin des années 50. Moins de cent exemplaires auraient été produits. Qui irait, à l'arrêt, démasquer une 2cv sous cette carrosserie aguichante ? Ah ! Par contre, dès que le moteur est lancé, on dévoile la supercherie ! C'est bien le son aigrelet du bicylindre Citroën qui se fait entendre. Cette rare UMAP mériterait une bonne restauration mais la sauvegarde en état authentique, dans son jus comme on dit, est respectable également.

Méhari
La suite demain !

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