De l'autre côté de la Lune

Ce n'est pas tous les jours que je cause musique. Aujourd'hui, l'écoute de deux albums fraîchement sortis de Pink Floyd m'en donne l'occasion.

Pink Floyd est un groupe de musique anglais. Je ne sais pas s'il y a autre chose à en dire. Il paraît qu'ils font de la musique de rock. Je mets "ils" au pluriel parce qu'il s'agit d'un groupe composé de plein de personnes. Au moins quatre ou cinq mais en fait vachement plus si l'on compte les chiens et les choristes.
La musique de rock, qu'est-ce que c'est. Selon l'analyse de mon grand-père (celui qui ne se foutait pas totalement de la musique), c'est du bruit et ce n'est pas de la musique. Si j'en crois certains sourds, c'est peut-être de la musique mais pas autant que la techno. Quelques pénibles feront perfidement remarquer que si le rock est de la musique, il faudra trouver un autre mot pour Beethoven, Bach, Arvo Pärt et Yvette Horner. Certains prétentieux non moins pénibles iront jusqu'à défendre bec et ongles que hors le Jazz, point de musique il n'y a. Pour moi qui tient de mon grand-père (celui qui se foutait totalement de la musique), je dis que la musique est un truc qui, habituellement casse les oreilles et qui a pour principale qualité de permettre de devenir sourd rapidement et de, par voie de conséquence, ne plus avoir à la subir. Nonobstant, comme je le dis souvent in petto mieux vaut un petit concert de musique qu'un long discours de Sarkozy[1]
Mais après ces considérations propres à éveiller les consciences, place à la critique musicale et à l'examen attentif de ces deux nouveaux disques. Pour commencer, nous prendrons le premier des deux. Il s'agit là d'une "remastérisation" issue des enregistrements originaux qui ont conduit au pressage de la première version, aux débuts des années soixante-dix. C'est vous dire que c'est pas du "tout jeune". Pas très loin de quarante ans ont passé et on peut dire que ça se laisse encore écouter. Peut-être surtout par les vieux qui, plein de la nostalgie des années perdues à tout jamais, se complaisent à verser quelques larmes sur leur jeunesse d'antan. Possible que les Alzheimer pourront découvrir l'album d'une oreille neuve mais je n'en ai pas sous la main pour vérifier. Donc, avec cet album[2], les Pink Floyd entament leur concept de "concept album". Faut pas demander, c'est du conceptuel. C'est pas fait pour être compris. Le souci avec les Pink Floyd, c'est qu'ils sont un rien prétentieux. Ils ont un message à transmettre. Lequel, personne ne le sait et pas même eux. Du rock, ils en font peut-être (et même qu'il paraît qu'il serait progressif) mais ils font du rock intellectuel. Passé le temps où ils faisaient de la musique de drogués, ils se sont mis à faire de la musique intello. Ça les regarde. Dans "The Dark Side of the Moon", il est question d'argent, de respiration, de temps, de "nous et eux", d'éclipse... On sent que ça vole haut dans les sphères de l'intellect boosté au LSD. Mais chut ! Faut pas le dire, les Pink Floyd sont des gens propres[3]. Les paroles chantées le sont en langue anglaise. Ça tombe mal que je n'entends rien à cette langue. Je ne vais décemment pas perdre mon temps à traduire les mots prononcés plus ou moins clairement pour tirer la maigre analyse que l'on pressent avoir à extraire de cette logorrhée indigeste. Laissons-nous plutôt porter par l'ambiance un peu triste et angoissante de la musique. On peut ne pas aimer Pink Floyd et cet album en particulier, on ne peut pas ne pas reconnaître que c'est efficace. Pour vous dire, à l'heure où j'écris ces lignes, j'écoute l'album enregistré en public à un niveau sonore qui, je l'espère, dérange efficacement tout le voisinage et j'y prends un certain plaisir[4].

The Dark Side of the Moon

Par rapport au disque d'origine, il est possible et même presque certain que l'on gagne en dynamique. Tout semble claquer un peu plus, être plus clair, plus puissant. Sinon, pas de surprise, c'est la même chose. Les mêmes morceaux mis dans le même ordre. Pas de version yodlée à la mode tyrolienne ou de maracas comme au Brésil. De ce côté, on reste sur sa faim et on n'a pas l'impression de découvrir grand chose. C'est à mon sens à réserver à celles et ceux qui n'ont pas l'album d'origine, qui le se sont fait voler, qui l'on égaré ou manger un jour qu'ils l'ont confondu avec une hostie.

Le second disque est un enregistrement en public réalisé au Empire Pool, Wembley, London 1974. Là, je n'ai pas compris si certains morceaux avaient été enregistrés à Wembley et d'autres à Londres ; si Wembley et Londres étaient la même ville ou je ne sais quoi encore. Les commentaires à ce propos ne sont même pas laconiques, ils sont inexistants. Peut-être personne ne se souvient bien de toute cette histoire ancienne. Allez savoir. Les morceaux sont les mêmes que sur l'enregistrement en studio et, là encore, sont enregistrés dans le même ordre. Parce qu'il s'agit d'une version "en public", on entend un peu le public s'extasier et il y a quelques menues différences d'avec l'enregistrement studio. Pour vous dire ce que j'en pense, c'est moins intéressant que la version studio. Ça n'apporte pas grand chose à l'album si ce n'est de prouver que ça a pu être commis en présence de vraies personnes. Toutefois, c'est très loin d'être parfaitement mauvais. Est-ce nécessaire ? Autant qu'une Rolex au poignet d'un quinquagénaire, je dirais.

Dans l'idéal, il aurait fallu que je me farcisse aussi l'écoute de l'album original pour que je puisse parler encore plus sérieusement de tout cela. Je n'en ai pas eu le courage. Si j'ai un conseil à vous donner, c'est d'écouter le meilleur album de Pink Floyd qui est Atom Heart Mother. Si vraiment vous avez des euros en trop, acheter ce double dont je vous cause. Ce n'est pas mal, ça pourra épater vos amis et réjouir vos oreilles. Et c'est bien là l'essentiel ! Ne boudons pas le plaisir que l'on peut avoir à réécouter The Dark Side of the Moon. Et puis, ça donne envie d'écouter autre chose, de Pink Floyd ou non.

Notes

[1] En prévision de sa déculottée de l'an prochain, j'ai décidé de commencer à en dire du mal le plus souvent possible

[2] que certains disent être le meilleur

[3] sauf un mais on ne dit pas de mal des morts

[4] à écouter comme à potentiellement déranger les voisins

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