Avant goût automnal

Comme je n'ai rien de particulier contre l'hiver, le printemps et l'été, je n'ai rien pour l'automne.

De toutes les saisons, je me demande si l'automne ne serait pas la plus déprimante. Aujourd'hui, je pense à l'automne parce qu'il me semble qu'il est arrivé. Et aussi parce qu'il me semble que j'ai attrapé une sorte de rhume mais ça peut être lié. Depuis hier, j'ai un léger mal de tête qui me fait penser que j'ai peut-être attrapé froid.
Je me suis levé et je me suis fait du café. J'ai écouté la radio et je l'ai arrêtée. Je n'écoute plus autant France Inter qu'il y a encore quelques années. J'aime moins. Je suis donc resté dans un silence relatif et j'ai pu entendre les sons venant de l'extérieur. Plus d'oiseau, plus que des sons étouffés, comme entourés de ouate. Pour moi, c'est l'ambiance sonore de l'automne. Ça remonte à loin puisque, dans mon souvenir, c'est rattaché à l'époque où nous habitions à Pontoise. C'est donc antérieur à 1974.
Mon grand-frère et moi faisions chambre commune. Nous avions la chambre qui donnait sur le jardin de derrière la maison. Nous avions chacun notre lit et nous avions une table de cuisine pour bureau. La rentrée des classes approchait et il faisait encore assez doux pour que la fenêtre soit ouverte. Dans mon souvenir, j'ai pris conscience en un instant que les vacances étaient bientôt finies et qu'il allait falloir retourner à l'école. Je me souviens d'une grande tristesse. Je n'avais pas envie de reprendre le chemin de l'école. Il y avait ces sons étouffés, comme s'ils venaient de plus loin que d'habitude.
Aujourd'hui encore, la perception étouffée des sons due sans doute à l'humidité et à d'autres phénomènes acoustiques et physiques éveille en moi le souvenir de cette veille de rentrée scolaire et me plonge dans une forme de douce mélancolie un peu désagréable. C'est bizarre comment des petits événements sans importance parviennent à s'ancrer autant dans la mémoire et comment la répétition de ces petits événements sans importance parviennent à les faire ressurgir à l'improviste.
Le chuintement lancinant des pneumatiques sur la chaussée mouillée, la chaleur moite, la lumière plus diffuse de l'automne jouent sur mon moral chaque année à peu près à la même époque durant quelques jours. L'arrivée des premiers froids m'apparaît comme moins pénible. C'est alors une période où l'on agit davantage. On cherche à se réchauffer, on se couvre, on courbe l'échine. Pour beaucoup, le mois le plus hostile serait celui de novembre. Et c'est vrai que ce mois là n'est pas des plus joyeux. Pour moi, c'est assurément septembre et, dans une moindre mesure, octobre.
J'ai essayé de dessiner, aujourd'hui. Je n'y suis pas parvenu. J'ai éviter de trop perdre de temps à cela, j'ai lavé un pull et j'ai bouquiné. J'ai aussi réfléchi à mon avenir professionnel. Je n'ai plus aucune envie d'aller travailler. Chaque jour que je dois me rendre à Périgueux pour gagner mon salaire est pour moi une corvée dont je me passerais aisément. Je n'y crois simplement plus et je m'y emmerde plus qu'autre chose. On me conseille de laisser pourrir la situation qui me semble déjà bien avancée question putréfaction. Une reconversion professionnelle serait sans doute une excellente chose pour moi. De toutes les façons, la situation financière de l'entreprise qui m'emploie est assez problématique, ces temps-ci. Avec un peu de chance, ça s'arrêtera bientôt tout seul.

Haut de page