Jardins suspendus de Marqueyssac

D'un côté de la Dordogne, Castelnaud-la-Chapelle, ses fortifications et son musée de la guerre ; de l'autre, Marqueyssac et ses jardins romantiques et poétiques qui invitent à la flânerie. L'un et l'autre comptent parmi les sites les plus visités du département et participent chacun à leur manière à la grandeur de ce département exceptionnellement riche.

L'approche des jardins de Marqueyssac est une promesse. Les premiers buis taillés invitent et aident à gravir le chemin qui mène à l'entrée et à la boutique où l'on s'acquitte du droit d'entrée. Les jeudis de l'été, il est possible de visiter les jardins de nuit, jusqu'à minuit. Alors, les allées, les chemins et les passages secrets sont éclairés d'environ deux mille bougies et d'éclairages savamment imaginés. Dès l'accueil franchi, on découvre ce qui est une des caractéristiques de ces jardins avec l'art topiaire et ces buis tout en rondeurs exquises.
L'entrée des jardins suspendus
Les allées gravillonnées sont remarquablement entretenues. Les abords du château permettent de se préparer à la visite des jardins en profitant d'un joli point de vue sur la vallée qui s'étend de part et d'autre de la rivière qui s'écoule, large et tranquille entre les falaises de calcaire. Les jardins de Marqueyssac débutent d'une manière classique, presque en un jardin à la française avec des parterres tracés au cordeau. Devant le château, tout est encore calme et charmant, à l'image de ces roses délicates contenues dans un écrin de buis.
Les roses devant le château
Des terrasses du château
La folie poétique gagne du terrain dès que l'on quitte le château pour rejoindre les jardins. Là les buis commencent à prendre des formes langoureuses en dessinant des arabesques tendres. On imagine le dessinateur de ces jardins jouant à tracer des circonvolutions en trois dimensions. L'art de la taille du buis est ici poussé à l'extrême et on ne peut que s'émerveiller devant le goût artistique certain de l'architecte des lieux. Contrairement à Castelnaud ou Beynac, le château de Marqueyssac n'est pas une place forte. Conçu au dix-huitième siècle comme résidence d'agrément, le château n'a pas eu à se parer d'une allure guerrière. Le charme de l'architecture se marie de belle manière avec les jardins moutonnants qui forment des boucles et des dédales propices à la promenade.
L'art de la taille poétique du buis
Dommage que la pompe ne soit pas branchée
En prenant le chemin qui mène au belvédère qui surplombe la Dordogne, on part pour plusieurs kilomètres de promenade libre à travers les bois du domaine qui s'étend sur plusieurs hectares. Le génie de ces jardins est d'avoir réussi à préserver l'aspect "naturel" et sauvage du bois tout en ménageant des espaces paysagés où l'on peut s'arrêter pour laisser libre cours à son imaginaire. A Marqueyssac, pas de visite guidée où l'on va se charger de vos émotions à votre place en vous prenant la main et en vous expliquant tout. Vous êtes libre. Ici, les jardiniers sont discrets bien que présents. Il est intéressant de constater combien les nombreux visiteurs respectent les lieux. Malgré un nombre conséquent de visiteurs (1400 ce jeudi), on ne voit pas de papiers par terre, pas de déchets. Rien. Le respect semble être imposé par les lieux mais aussi par le souci de ne pas trahir l'esprit de ces lieux et la confiance faite aux visiteurs par les maîtres des lieux. Le marché tacite semble être : "vous pouvez visiter nos beaux jardins à la conditions que vous soyez assez intelligents pour ne pas les dégrader". Et on peut penser que les visiteurs sont majoritairement des personnes intelligentes. Il faut reconnaître que la visite des jardins de Marqueyssac ne valent que si l'on a cette intelligence et cette fibre poétique qui permettent de goûter le bonheur qui inonde les sens. Rien n'est absolument exceptionnel dans l'absolu et rien n'est fait pour créer cet exceptionnel trop artificiel et facile. On fait vraiment confiance à la sensibilité de chacun pour trouver matière à émotion. A Marqueyssac, rien n'est démonstratif, rien n'est trop explicite, rien n'est trop appuyé. C'est au visiteur de tomber sous le charme, de découvrir les mille petites surprises parfois bien cachées. C'est la liberté. Vous allez où vous voulez au rythme que vous voulez, dans le sens que vous voulez. Vous allez, vous revenez, vous repartez, vous tentez, vous testez, vous cherchez. Mais il faut marcher, ça c'est sûr ! Et vos pas vous mènent par exemple, si vous prenez la route du belvédère, donc, vers une petite chapelle construite en surplomb de la falaise. C'est tout de suite après que les jardins fabuleux débutent.
La chapelle
Par endroits, la falaise a besoin de soutien. La croix veille au grain.
Vous marchez à flanc de falaise et la magie débute sans que l'on s'en rende bien compte. Qu'est-ce donc qui fait que l'on peut trouver beau cette roche somme toute banale ? Mystère. Par petites touches les jardins distillent l'émotion.
Ce jeudi, on préparait les jardins pour la nuit. Les jardiniers disposaient les bougies, plaçaient les chaises pour les concerts. Les visiteurs étaient nombreux malgré la météo qui n'annonçait rien de bon. D'ailleurs, en raison des prévisions, le tarif habituellement plus élevé les jeudis soir avaient été maintenus à la normale. Il n'était pas garanti du tout qu'il n'allait pas pleuvoir. Plutôt qu'annuler, on s'affairait à préparer les lieux.
Plus de deux mille bougies sont allumées pour les nuits de Marqueyssac
Les chaises attendent le concert de la nuit
L'éperon rocheux sur lequel les jardins sont construits permet de jouer entre végétal et minéral. La roche fait partie intégrante des jardins et il est étonnant de voir comment le végétal arrive à se faire sa place dans cet environnement. On voit des arbres de bonne taille faire courir leurs racines à la surface du calcaire à la recherche d'une faille où plonger pour aller chercher sa subsistance.
"En contrecoup du plissement alpin, le Massif Central s'est soulevé. Il a été rajeuni".
Jusqu'où aller puiser ses ressources ?
La visite se poursuit toujours en longeant la falaise et en direction du point le plus évident des jardins, le belvédère. Comme dit précédemment, on est libre d'aller où l'on veut et il n'y a pas de "sens de la visite". Si l'on souhaite entrer sous les frondaisons, on peut bifurquer et emprunter un nouveau chemin. Il y a ainsi des surprises que l'on ne découvre que si l'on est assez curieux. Selon que l'on choisit ce petit chemin ou celui-ci, on verra ou pas une discrète et maigre cascade.
Un parcours des plus agréables
Eau reccueillie dans un bassin
Cascade
Je ne sais pas ce qui a fait que le Périgord a été choisi par l'homme depuis si longtemps. Je suppose que sa nature y a beaucoup contribué. La profusion de forêts fait que l'on doit pouvoir trouver de quoi se nourrir ; l'eau n'est jamais bien loin non plus. Le climat qui ne semble pas avoir grand chose d'exceptionnel permet pourtant de cultiver plusieurs sortes de plantes et, de fait, la diversité est grande en Périgord.
Tronc de châtaignier âgé de 350 ans
Cascade d'eau qui ira rejoindre la Dordogne
La maîtrise du chemin de l'eau
Un des nombreux chemins des jardins
Arbre penché
Le belvédère est l'occasion de profiter d'un point de vue assez magnifique. De là, sur la plate-forme métallique construite pour accueillir le plus grand nombre de visiteurs, on surplombe la vallée de la Dordogne et on voit les villages de Castelnaud-la-Chapelle, Beynac-et-Cazenac, Domme, Fayrac et de la Roque-Gageac. On peut essayer de faire des photos, l'occasion est trop tentante. D'ailleurs, l'idée de ramener des images semble être assez globalement partagée par les visiteurs qui se pressent ici.
La Dordogne au bas de Marqueyssac
La Roque-Gageac dans l'ombre de Marqueyssac
La Roque-Gageac vue depuis le belvédère
La Roque-Gageac vue depuis le belvédère
La magie simple de Marqueyssac, végétaux et minéraux
Les touristes se pressent au belvédère
Après le passage obligé par ce belvédère, il est l'heure de prendre le chemin de l'étrange ! A partir de là, il y a moins de visiteurs. Tout commence par une promenade en sous-bois certes agréable mais qui semble manquer d'originalité. Du moins jusqu'à ce que l'on découvre ce que cachent les chênes, châtaigniers et autres arbres traditionnels des forêts périgourdines. Par exemple, on tombe sur une sorte d'être bizarre hérissé de piquants. On ne sait pas ce que c'est. Un hérisson géant ? Peut-être. Et puis, ce sont des têtes qui pourraient faire penser à celles de Trolls qui affleurent dans une petite clairière. Au bout du chemin boisé, on découvre une jolie petite borie moussue.
Ces jardins abritent des être étranges
Têtes de troll
Têtes de troll
Borie au fond du bois
La promenade est très agréable et on redescend toujours à travers bois vers les jardins tandis que le jour est en train de tomber. On a déjà quelques kilomètres dans les pieds mais la marche est facile et l'on ne se rend plus compte du temps. En rejoignant les jardins, on constate que les éclairages ont commencé à fonctionner. Sans se presser, on continue la visite en n'hésitant pas à découvrir les nombreuses surprises qui nous attendent.
Puits lumineux
Arbre de lumière
Immanquablement, la nuit commence à gagner du terrain et les jardins prennent une nouvelle dimension avec les bougies et les éclairages disposés çà et là. Les premiers concerts débutent et la magie grandit encore. On retrouve un couple d'amis qui sont arrivés à la nuit tombée et nous rejoignons le château en prenant des chemins détournés et féériques pour nous arrêter à la terrasse du restaurant pour boire et manger quelques douceurs. La nuit est fraîche mais belle et je décide de faire une photo de Beynac. Ensuite, nous repartons vers le jardin pour assister à quelques concerts et savourer les jardins éclairés.
Beynac vu de nuit depuis Marqueyssac
Il me reste encore des photos et des trucs à raconter. On verra peut-être cela demain.

Haut de page