Travail et création

Hier soir, Art Spiegelman était l'invité de l'émission culturelle "l'humeur vagabonde" de Kathleen Evin sur France Inter.

Art Spiegelman est connu surtout pour son œuvre maousse, Maus[1]. Hier soir, il était invité pour parler de l'exposition qui lui est consacrée au centre Pompidou jusqu'au 21 mai 2012 et qui retrace son parcours et l'entièreté de son œuvre. C'était aussi et presque surtout l'occasion de parler de l'acte de création artistique vu par cet artiste.
Art Spiegelman n'est ni mon dessinateur ni mon illustrateur préféré. Je ne connais pas toutes les facettes de son travail. Pour autant, je reconnais et apprécie ce que j'ai pu voir de son œuvre. Le sujet de ce billet n'est pas tant de parler de Art Spiegelman que de s'intéresser à sa vision de la création et de ce que je pense moi de cette chose là.

Premier point, Art Spiegelman ne se présente pas comme dessinateur ou illustrateur mais comme artiste. A mon avis, ça a son importance. Il a expliqué combien parfois il était difficile de trouver le dessin et le nombre d'esquisses et de croquis qu'il lui était parfois nécessaire de faire pour réussir une case. Cela m'a vraiment intéressé.
Lorsque je dessine, mon souci est, justement, de ne pas faire d'essais, ne pas chercher, ne pas esquisser. Le dessin doit arriver facilement et si ce n'est pas le cas, je considère cela comme un échec. Pour moi, un dessinateur doit produire aisément. S'il n'y parvient pas, c'est qu'il est mauvais. C'est d'autant plus bizarre que nombreux dessinateurs avouent créer dans l'effort, que ce soit Franquin ou Gotlib. Jusque là, je pensais que les dessinateurs se donnaient une posture ou feignaient la modestie. Il est possible qu'ils n'aient pas menti. Allez savoir.
Ceci dit, je ne suis pas un artiste et cela change beaucoup de choses. Le moins que l'on puisse dire de la production de Art Spiegelman, c'est qu'il ne dessine pas pour rien. Il a des messages à faire passer. A priori, sauf accident, ce n'est pas mon cas. Mais il est aussi possible que je ne me donne pas la peine de travailler assez pour dire ce que je pourrais avoir à dire. Du coup, c'est un peu prétentieux. Je ne me compare pas à Art Spiegelman du tout ! Il ne faut pas qu'il y ait méprise !
Cette émission m'a fait réfléchir sur le "métier" de dessinateur. Je me sais fainéant et quelque peu fumiste mais là, j'ai compris que si je souhaite avancer, il me faut me résoudre à travailler. C'est fou. Je me connais assez pour savoir que j'ai toutes les facultés requises pour faire preuve de la plus féroce des procrastinations. Je peux me faire confiance sur ce sujet. Il n'empêche que je sais que ce serait la chose à faire et qu'il serait vraiment bien que je m'y tienne. Ce n'est pas gagné.
Cette fainéantise crasse m'a conduit à privilégier la facilité. En quelque sorte, je fais ce que je sais faire et j'abandonne à chaque fois que je me vois confronté à un problème qui pourrait se résoudre à condition de travail. Ce qui est intéressant, c'est que c'est justement ce que je me reproche. L'émission d'hier m'a peut-être fait comprendre que même les grands artistes pouvaient avoir besoin de travailler pour réussir à produire. Si eux en sont réduits à pareille extrêmité, je devrais avoir la décence et l'humilité d'admettre qu'il pourrait en être de même pour une personne aussi exceptionnellement grandiose que moi, non ?

Note

[1] Je n'ai pas pu m'empêcher

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