C'est loin d'être gagné

"Cent fois sur le métier remets ton ouvrage". Je ne sais pas s'il s'agit là d'un adage populaire. D'ailleurs, je n'ai jamais su faire précisément la différence entre l'adage, le dicton, le proverbe ou je ne sais quoi d'autre encore. Il y en a un autre, d'adage, qui dit : "faire et défaire, c'est toujours travailler". Le problème, c'est qu'il y a aussi celui qui prétend : "tout travail mérite salaire".

Je ne me plains pas. Je préfère le préciser dès le départ. Ce boulot que l'on m'a commandé, ce dessin, ça m'amuse de le faire. Je ne le fais pas pour l'argent. Si l'on me paie, tant mieux mais ce n'est pas la finalité, pour moi. Disons que ça m'occupe et que ça m'évite de trop m'ennuyer et de trop regarder la pluie qui tombe, de trop pester contre les températures trop basses et toutes ces choses qui font que nous avons le printemps le plus pourri depuis la dernière ère glaciaire.
Il y a quelque temps de cela, on me demande un dessin. Je fais quelques propositions et l'une d'elles est validée. Je commence à encrer ce dessin et le communique à mon client qui me répond que c'est ballot mais qu'il y aurait quelques modifications à apporter. C'est ballot parce que, pour moi, le dessin a été validé et qu'il est terminé. Mais parce que je suis souple et gentil, je reprends le dessin que je refais entièrement en tenant compte des modifications à apporter. Au passage, j'en profite pour améliorer quelques détails et pour ajouter quelques éléments qui me semblent dignes d'intérêt.
Je soumets la nouvelle version à mon client qui, horrifié, m'annonce que cela ne va pas du tout. Que l'on ne reconnaît pas le dessin original, dessin qui a été validé par un comité de validation et que ledit comité ne va pas être content d'avoir autre chose que ce qu'il a validé au terme d'âpres et épuisants débats. Je comprends le désarroi engendré par ma prise inconsidérée de liberté artistique et m'engage à revoir ma copie dans les plus brefs délais. De fait, je prends une nouvelle feuille de papier et m'applique à recopier le plus fidèlement possible le dessin original validé tout en ajoutant ce qui était demandé, en l'occurrence, une halle.
Satisfait de mon travail, je le soumets à mon client qui, un peu gêné il est vrai, m'annonce qu'il serait bien d'ajouter encore un petit élément de rien du tout, sur la droite du dessin. Je ne suis plus à ça près, j'attrape ma gomme, efface une partie de ce qui se trouve à droite et ajoute cet élément, une petite cabane de pierres sèches comme on en trouve dans notre beau Périgord. Je tente de m'appliquer et j'envoie le fichier pour faire voir ce que ça donne.
Evidemment, vous vous en doutez déjà, c'est de nouveau un refus catégorique. Lorsque l'on parlait d'ajouter la cabane sur la droite, il s'agissait bien de l'ajouter encore plus à droite de l'existant. Pour moi, c'est un souci parce que plus à droite, je sors de ma feuille de papier. Je me dis que je vais ajouter une feuille après la feuille pour élargir mon champ d'action. Et donc, nous en sommes là. J'ai ajouté la cabane sur une autre feuille, j'ai assemblé les morceaux avec un logiciel et j'ai envoyé le fichier au client. J'attends sa réaction. Je vous tiendrai au courant.

Vision fantasmée et déformée autant que maladroite et approxi

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